Le 20ème siècle c’était l’ère du management à la papa. Le 21ème siècle souffle un vent de renouveau dans le management.

On entend parler du management 3.0 sur certains blogs (bien que je n’aime pas DU TOUT ce terme, je vous invite à lire cet article pour en savoir plus).

Au hasard des recommandations Youtube, je suis tombé sur une interview vidéo de Julia de Funès et Nicolas Bouzou, donnant leur vision des choses sur le management.

Je suis sous le charme ! Et j’adhère totalement à leur vision.

La comédie (in)humaine

Julia de Funès & Nicolas Bouzou sont les 2 auteurs du livre « La comédie inhumaine ».

La comédie (in)humaine - Comment les entreprises
font fuir les meilleurs

Bon je ne l’ai pas encore lu je ne pourrais donc pas vous en faire une revue détaillée.

Mais… (car oui, il y a toujours un mais) voici ce que je peux vous en dire :

Les auteurs partent du constat que les entreprises s’affichent comme étant à taille humaine, comme étant centré sur l’humain, la bienveillance, le bien-être au travail, voire même le bonheur au travail.

Mais tout ça c’est du flanc. ! L’entreprise est devenue le lieu de l’absurde.

Absence totale de sens, processus et organisations inadaptées, elles font fuir les talents alors que leur principal objectif devrait être de les attirer et de les conserver, laisse la contamination de la réunionite aiguë se répandre, etc…

Tout cela génère du burn-out, du bore-out et même du brown-out. Et quelle est la réponse des entreprises face à ce constat ?

Embaucher plus de monde pour faire parler 2 services entre eux, en restant persuadé que :

Service incompétent + agent de liaison + Service incompétent = Compétence.

Désolé mais non.

Incompétence + Incompétence = Double incompétence.

C’est aussi simple que ça.

Ou alors elles donnent accès à un babyfoot, mettent une corbeille de fruits à disposition, du café à volonté, ou embauchent des Chief Happiness Officer.

Tout ça au nom de l’innovation, de la performance, du progrès!

Sauf qu’agir sur la forme ça ne résout pas le problème de fond : un travail aliénant, un manque de sens, une désorganisation ambiante.

Vous pouvez l’enrober dans une feuille d’or, un paquet de merde restera un paquet de merde.

8 propositions pour en finir avec le management à la papa

Une fois le constat établi qu’en entreprise nous faisons tous face à un ramassis d’absurdités, la seule question légitime à se poser est : que fait-on ? Comment peut-on changer ? Améliorer les choses ?

Voici 8 pistes de solutions évoquées par les auteurs.

1 ) Ne plus nommer les managers

En France on aime bien promouvoir des techniques à des postes de managers.

Après tout, si ils ont obtenu des résultats remarquables à leurs postes d’experts techniques, ils feront encore mieux sur des postes d’encadrement des experts techniques. Sur des postes de managers.

C’est le raisonnement dominant. Et désolé, mais… non.

Il s’agit de 2 métiers totalement différents, et on peut être bon technicien mais très mauvais manager. Tout comme l’inverse. L’expertise technique ne fait pas tout.

Un manager gère de l’humain au quotidien, il organise, priorise, arbitre parfois, négocie, suit le budget, mais il n’agit pas techniquement.

En nommant des managers, il y a 3 perdants :

  • Le nouveau manager qui n’est pas satisfait de la situation et se rend compte après coup qu’il n’est pas adapté au poste.
  • L’équipe qui est mal managé, ce qui peut la démotiver, faire baisser ses performances et faire fuir les meilleurs.
  • L’entreprise, qui a perdu son meilleur élément technique devenu manager, et qui est en train de perdre le reste de l’équipe.

Devenir manager, ça devrait être un vrai choix de carrière, et non pas une promotion par défaut pour récompenser de bons éléments techniques.

ça ne s’improvise pas, et ça nécessite d’être formé et accompagné.

2 ) Définir un mantra dans l’entreprise

Nous manquons tous de sens au travail.

Vous ne me croyez pas ? Regardez autour de vous : combien de personnes sont capables d’expliquer clairement la mission de leur entreprise ?

Il y a un manque cruel de définition d’un projet commun dans les entreprises. On fait souvent face à des guéguerres entre services pour se renvoyer la balle et éviter de travailler tout en accusant l’autre, ou pour essayer de grappiller du budget ou ne pas se le faire rogner, afin de pouvoir faire mumuse avec des gadgets sans intérêts par la suite.

Il est urgent de définir un mantra de l’entreprise, permettant de rassembler tout le monde autour d’un message clair.

Ce mantra est une phrase, définissant le projet commun de l’entreprise, sa mission, sa raison d’être.

Par exemple, connaissez-vous l’entreprise Patagonia ? Ils vendent des vêtements résistants et préfèrent les réparer plutôt que les jeter et vous inviter à en racheter. Au nom de l’écologie, de la protection de notre planète. Ils luttent contre le gaspillage, le consumérisme à outrance, etc…

Vous savez quel est leur mantra ?

« Notre entreprise existe pour sauver notre planète. »

Plutôt clair, non ? 

3 ) Rendre les intitulés de poste lisible

J’ai remarqué une tendance sur LinkedIn qui me fait toujours autant rire : c’est la course aux intitulés les plus créatifs et les plus anglophones possibles. Certains ne manquent pas d’imagination…

Et cette manie a gagné les entreprises. Les intitulés de postes nous parlent de moins en moins, aussi bien de l’extérieur que de l’intérieur.

On met de l’anglais partout, c’est plus classe. On insère un petit « chief » ou « manager », et hop on se dit que ça ajoute du prestige. Sauf qu’entre être responsable d’équipes et avoir « manager » dans son intitulé de poste, il y a un sacré gap.

Vous voulez quelques exemples ? Allez, c’est parti, en voici quelques uns :

  • Floor manager (de quoi s’agit-il exactement ? Terme courant dans le monde de la vente, mais je n’ai toujours pas clairement compris ce qu’il en était)
  • Chief Happiness Officer (Responsable du bonheur, sérieusement ? mon bonheur se porte bien, et je n’ai besoin de personne pour m’expliquer comment être heureux, merci)
  • Team Leader (bon moyen de propulser quelqu’un leader sans le payer plus, sans lui donner la responsabilité d’une équipe, mais permettant de trouver un responsable quand une merde se produit)
  • Brand Story Manager (oui vous êtes au service communication quoi)
  • Coordinateur de flux transverse (si vous avez trouvé, faites-moi signe car là je sèche…)

Certaines de ces fonctions sont sûrement utiles. D’autres peut-être pas, mais là n’est pas la question.

Le problème, c’est que personne ne comprend le poste, ce qui se cache derrière.

Si ce n’est pas clair pour moi, si ce n’est clair pour vous, comment voulez-vous être performant dans votre poste ?

La crise de sens actuelle en entreprise peut s’expliquer en partie par le fait que le sens n’est pas inscrit dans l’intitulé de poste.

Nicolas Bouzou propose de laisser les gens définir eux-mêmes leurs fonctions : c’est selon lui plus sensé que de laisser l’entreprise nommer le poste.

A une nuance près : ne pas chercher à avoir l’intitulé le plus « shiny » (brillant) possible.

4 ) Redorer le blason des fonctions support

Les fonctions support sont au service des employés qui créent de la valeur en entreprise, et qui sont au contact direct des clients finaux de l’entreprise.

Et non pas l’inverse comme on le voit de plus en plus.

Qu’il s’agisse du service informatique, des ressources humaines, de la communication, de l’administration, de la comptabilité, des services généraux, et des autres que j’ai sûrement oublié, nous sommes TOUS au service de l’entreprise.

Notre mission est de faciliter la vie aux collaborateurs, pas de pondre des règles à la con qui alourdissent inutilement les démarches.

Le plan d’action pour y arriver est clair :

  • Rappeler aux services support qu’ils sont au service de l’entreprise et de ses collaborateurs et non l’inverse.
  • Simplifier les processus. Simplifier les outils.
  • Travailler avec les équipes pour qu’elles soient orientées résultats et clients finaux, plutôt que de chercher à se protéger.
  • Rester accessible, joignable et disponible.
  • Être réactif et répondre du mieux possible aux sollicitations.

5 ) Réduire les PowerPoint

On a tous connu ces réunions assommantes où l’animateur présente des slides PowerPoint fait à l’arrache, et est en train de lire son texte.

Franchement, quel est l’intérêt ?

Un PowerPoint est là pour appuyer une idée, pas pour servir de pense-bête. ça doit faire passer un message, pas répéter bêtement ce que l’on dit.

Il y a trop de texte, trop de slides, trop de chiffres, c’est indigeste, ça n’a parfois aucune cohérence, et c’est impossible à retenir.

Mais bon, ça occupe, on brase du vent pour créer ces slides, on brasse du vent pour les présenter, et on justifie comme ça son poste et son salaire…

Le pire, c’est qu’en utilisant PowerPoint, on se force à complexifier sa pensée, à structurer les choses (artificiellement).

Et si on disait STOP ?

Vous avez besoin de pense-bête ? Notez les grandes idées à aborder sur une feuille, ce sera amplement suffisant.

Arrêtons d’utiliser à tout va des PowerPoint, ça ne sert strictement à rien si ce n’est distraire son audience ou l’assommer encore plus, à complexifier les choses et à diluer son message.

Tout l’inverse de ce qu’on attend d’une réunion en fait.

Pour aller + loin je vous invite à lire cet article afin de gagner du temps en réunion.

6 ) Supprimer les chartes

Plus ça va, plus on voit fleurir des chartes en entreprise. La petite dernière ? La charte éthique.

Soyons honnêtes : avez-vous déjà lu toutes les chartes de l’entreprise ?

Moi oui. Et il a fallu me faire violence pour ça.

Vous savez ce que je peux vous dire de la charte éthique ? Ce n’est pas de la morale, ce n’est pas de l’éthique, c’est juste une liste de « il ne faut pas », « tu ne dois pas », rédigée dans un jargon inutilement complexe.

Le plus drôle, c’est quand vous savez pertinemment que ceux qui ont pondu ça ne s’y tiennent absolument pas. Mais bon, c’est pas grave, ça fait « bien » et ça permet de se protéger en cas de pépin.

On est passé en entreprise de la prise d’initiative et la recherche d’efficacité au protégeage de culs et au « c’est pas moi c’est l’autre ». Et en cours de route, on a perdu l’humain.

Franchement quand je lis toutes ces chartes, j’ai l’impression d’être en maternelle avec la maîtresse qui vous explique tout ce que vous ne devez pas faire, ce que par contre vous devez faire et comment le faire…

Je ne sais pas vous mais quand je lis tout ce que je ne dois pas faire :

  • C’est impossible de se souvenir de tout.
  • J’ai la désagréable sensation qu’on ne me fait pas confiance et qu’on cherche à me contrôler.
  • Je sais d’avance que le respect des règles sera plus important que la prise d’initiative et les résultats.
  • ça ne me motive pas à me donner à 100% pour la boîte.
  • Ce n’est tout simplement pas lisible, voire pas compréhensible. Les joies du jargon juridique quoi…

Et l’humain dans tout ça ?

Pourquoi ne pas plutôt travailler sur le sens et l’autonomie, et recruter les bonnes personnes dès le départ, plutôt que de prendre n’importe qui puis d’expliquer comment ils doivent se comporter ?

Simplifions les choses, réécrivons nos chartes (si c’est compliqué de les supprimer), et passons de l’interdiction (il ne faut pas, vous ne devez pas) à l’affirmation (vous pouvez/ vous devez. Passer du négatif au positif, ça peut déjà changer beaucoup de choses niveau perception.

7 ) Valoriser le courage (et arrêter avec les valeurs bidons)

Les valeurs en entreprise, c’est toujours un franc moment de rigolade. On se réunit en début d’année, on fait un séminaire de direction, et hop on inscrit 4 ou 5 mots sur un PowerPoint pour décider des valeurs de l’entreprise.

Et voilà mesdames et messieurs, la cuvée 2020 est prête !

Oui oui, il y a des entreprises qui changent de valeurs chaque année sur le papier.

Pratique pour suivre côté collaborateurs…

Laissez-moi vous expliquer quelque chose : une valeur ça ne se décrète pas. ça peut faire beau sur un slide, ou affiché en grosses lettres noires sur un mur. Mais tout ça ce n’est que de l’apparence. Du flanc.

En plus, certaines valeurs n’en sont tout simplement pas : l’excellence, la loyauté (ça veut dire quoi au juste être loyal à son employeur ? On n’a pas le droit d’aller voir ailleurs si l’herbe est plus verte ?), être corporate (corp comme on m’a récemment sorti en entretien d’embauche… J’avoue j’ai rigolé), l’excellence, la performance, la satisfaction client, etc…

Déjà la performance et la satisfaction client ce n’est pas une valeur, ça devrait être l’objectif de toute entreprise.

Ah , on voit beaucoup l’humain aussi dans les valeurs. ça fait bien, c’est dans l’ère du temps. Mais quand dans le même temps les RH vous considèrent comme un numéro, comment peut-on parler de valeurs humaines dans l’entreprise ? Sérieusement ?

Comme je l’ai dit les valeurs ne se décrètent pas. Les valeurs d’une entreprise émerge de l’entreprise, des collaborateurs, de leurs comportements.

Le meilleur moyen de porter une valeur dans l’entreprise, c’est par l’exemple. Une valeur ça se vit, ça s’incarne. Sinon ça reste juste des mots écrits sur un bout de papier pour se faire mousser et s’auto-congratuler en séminaire d’entreprise.

Et si on n’en choisissait qu’une ? Je dirais valoriser le courage.

Il y a un manque flagrant de courage en entreprise.

On n’ose plus dire non, on n’ose plus porter ses idées et les assumer, on n’ose plus prendre la moindre décision, on n’ose pas reconnaître quand les choses vont mal, et on ose encore moins reconnaître ses erreurs et négocier un changement de cap à 90 degrés.

Pourtant en réinstaurant la valeur du courage, on gagnerait beaucoup en efficacité et en temps, si on avait le courage de dire ce que l’on pense, de faire ce que l’on dit, et de prendre des décisions.

8 ) Redonner autonomie et responsabilités aux collaborateurs

Redonner du sens aux collaborateurs est devenu indispensable. S’il n’y a pas de sens, comment comprendre pourquoi on se lève tous les matins pour aller travailler ? Comment se motiver ?

Mais redonner du sens ne suffit pas. On doit redonner de l’autonomie et de la responsabilités aux collaborateurs.

Et cela passe par la confiance.

Vous, moi, nous sommes tous des professionnels. Nous avons été embauchés pour un métier, et pour le faire bien et obtenir des résultats.

Donc arrêtons avec les processus qui se complexifient et les points de validation et contrôle dans tous les sens. Arrêtons avec le mille-feuille managérial à n’en plus finir. Arrêtons d’infantiliser les employés.

On en est arrivé à un point où pour passer commande de 500€ de matériels de base, il faut obtenir la validation de 5 managers, la signature en double exemplaire du Directeur Général ou du Président, et remplir 3 tonnes de paperasse. Tout ça pour une commande de 500€.

Alors que ça a coûté bien plus à la boîte de suivre ce processus inutile et d’enfin pouvoir passer commande.

Imaginez ce que ça doit être lorsqu’on parle d’investissement, de renouvellement de matériels, de recruter, etc…

La confiance, l’autonomie et la responsabilité des collaborateurs ça devrait devenir la nouvelle mission des managers.

Les réunions 1to1 sont un formidable outil pour redonner le pouvoir et la parole aux collaborateurs. Pour planifier, cadrer et suivre ces réunions, je vous recommande d'ailleurs l'application Aster, qui a comme objectif de rendre nos réunions plus efficaces et plus impactantes.

Conclusion

Une fois le constat fait que nos entreprises sont tout sauf humaines, qu’il y de l’absurdité à tous les niveaux, qu’il faut repenser en profondeur les processus et les organisations, … Il faut agir !

Et par agir je veux dire ne pas faire du neuf avec du vieux !

Reprendre un vieux concept et l’emballer c’est bien beau mais ce n’est pas en essayant de faire la même chose encore et encore que l’on atteindra un résultat différent.

Je vous le dis : il est urgent de repenser le fonctionnement des entreprises et de changer en profondeur.

Et vous, qu’en pensez-vous ? Quelles sont vos propositions pour changer en profondeur nos entreprises ?

Thibault Baheux

A propos

Tour à tour manager et chef de projet depuis 2008, j'ai managé des équipes jusqu'à 40 collaborateurs, aussi bien en management hiérarchique direct qu'en transversal.

Manager des personnes, c'est la chose la plus compliquée que j'ai eu à faire dans ma carrière. Mais c'est aussi la plus passionnante !

Je partage avec vous sur ce site mes meilleurs conseils, mes retours d'expérience, ma vision du management d'aujourd'hui et de demain.

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  • Je te l’ai déjà dit, quand je te lis j’entends ta voix. Au moins ton message est clair, les mots « cul et con » n’ont qu’une seule signification…
    Reste comme tu es, même si tu déranges certaine personne, pour ma part même si je ne suis plus dans le monde tu travail, tu me fais beaucoup réfléchir..

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